Course à pied ; danger pour les articulations ?

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Excellent article de mon collègue kinésiologue Patrick Roy, B.Sc., spécialiste en réadaptation en contexte de douleur chronique (SRDC) et conférencier-résident à l’institut de kinésiologie du Québec. Visitez son site au http://patrickroykin.ca/

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Mythe: La course à pied serait un exercice néfaste à cause des impacts.

FAUX.

Il faut identifier quels types d’impacts sont générés, ainsi qu’évaluer la condition physique et les patrons moteurs d’un individu (“comment” la personne effectue son mouvement) avant de pouvoir déterminer si une activité physique convient. S’il est possible que la course à pied soit déconseillée pour une partie de la population*, il faut savoir que l’affirmation ci-haut, parce qu’elle est abusivement généralisatrice, est certainement fausse.

(* Certaines conditions musculosquelettiques peuvent affecter votre capacité à faire certains exercices. De même, des troubles métaboliques comme le diabète peuvent, dans certains cas, engendrer une perte de sensation des membres inférieurs. Si nécessaire, consultez votre médecin avant d’entreprendre un programme d’exercice avec un kinésiologue accrédité.)

La course à pied est un exercice qui requiert la participation de nombreux groupes musculaires et le taux de dépense énergétique qu’elle requiert en font une activité très utile au maintient d’une saine composition corporelle. De plus, étant un exercice à forte composante aérobie, elle engendre des bienfaits certains pour le système cardio-vasculaire. Elle permet d’atteinte facilement un niveau d’intensité supérieur à celui de la marche.

Y-a-t-il des impacts lors de la course à pied ?

Oui.
Sont-ils néfastes ?
Seulement s’ils sont excessifs.
L’exercice à intensité moyenne à élevée, impliquant plusieurs groupes musculaires et comportant des impacts, tend à préserver la masse musculaire et la masse osseuse (diminuant les risques d’ostéoporose).

Qu’est-ce qui peut causer des impacts excessifs ?

– Une forte surcharge pondérale (obésité), par exemple, augmente la force des impacts. Le kinésiologue peut alors proposer des activités alternatives plus adaptées.
– Une mauvaise technique de course. Pour la grande majorité d’entre nous, il nous faut réapprendre à courir.

Pourquoi adopte-t-on une mauvaise technique de course ?

– Mauvais souliers de course
– Déconditionnement physique causé par l’inactivité chronique
– Manque d’information sur ce qui constitue une bonne technique de course

La question des souliers de course

Une partie de l’industrie affirme, à tord, que des chaussures de sport à semelle extra-épaisse et offrant une super-stabilité sont un moyen de prévenir les blessures liées à la course à pied.

Aucune chaussure n’offre une absorption totale des chocs. Cela est impossible. Elle ne peut que redistribuer l’énergie de l’impact sur une plus grande période de temps et sur une plus grande surface de contact. Cela vous permet de ne plus sentir les impacts en surface (au niveau des pieds), quoique vous les sentez peut-être, à long terme, au niveau des genoux, ou des hanches même.

Et c’est là que la chaussure devient problématique. En vous empêchant de ressentir le contact direct avec le sol; en empêchant les mécanorécepteurs de vos pieds de faire leur travail et signaler la présence d’impacts excessifs causés par votre patron moteur fautif, elle entretiennent une mauvaise technique de course qui peut à long terme poser problème.

Essayez l’expérience suivante:
– Trouvez un espace où vous pourrez courir sur une courte distance, de façon sécuritaire. Assurez-vous qu’il n’y ait pas d’objets sur le sol.
– En portant vos meilleures chaussures de sport, effectuez quelques aller-retours. Remarquez ce qui ce passe lorsque vos pieds entrent en contact avec le sol. Quelle partie du pied entre en contact la première ? Est-ce le talon ?
– Retirez vos chaussures et répétez l’exercice. Remarquez qu’après quelques répétitions, vous courez peut-être différemment. Vous cherchez instinctivement à éviter la douleur de l’attaque-talon; vous déposez plutôt la plante de vos pieds au sol.

Il n’est pas nécessaire d’être pieds nus pour bien courir. Par contre, il importe de choisir des espadrilles qui vous sont adaptés, et spécifiques à l’activité que vous pratiquez. À titre d’exemple, j’utilise une paire légère et à semelle mince pour la course, tandis que j’utilise une paire plus traditionnelle, de type “multisport”, pour mes autres activités.

Effets de l’inactivité physique sur la technique de course

L’inactivité physique engendre non seulement des conséquences néfastes pour la santé, elle rend également plus difficile l’éventuelle adoption d’un programme d’exercice. L’amplitude de mouvement de chaque articulation devient limitée, le dos est indirectement atteint, et l’endurance musculaire est faible. Plus spécifiquement, les obstacles à l’adoption d’une bonne technique de course sont souvent causés par trop de temps passé en posture assise. Cette dernière engendre souvent une perte de flexibilité des groupes musculaires ischio-jambiers (muscles postérieurs de la cuisse, fléchisseurs du genou et extenseurs de la hanche), psoas (fléchisseur de la hanche), iliaque (fléchisseur de la hanche), droit fémoral (extenseur du genou et fléchisseur de la hanche), et gastrocnémien (“mollet”, fléchisseur plantaire). Il en résulte une perte d’amplitude de mouvement à la course, qui risque d’engrendrer perte d’efficacité énergétique et tendance aux compensations malsaines du patron moteur.

C’est grâce à une évaluation de votre condition physique qu’il est possible d’élaborer un programme d’exercice de course à pied sécuritaire et adapté. En combinaison avec un bon coaching et l’apprentissage de ce qui constitue une bonne technique de course, cette merveilleuse et saine activité physique qu’est la course à pied sera plaisante, stimulante, et, incorporée à un programme global de mise en forme, bénéfique pour votre santé.

Site web de Patrick : http://patrickroykin.ca/

Le meilleur type d’exercice pour prévenir les blessures sportives

bvd-st-lambert-qt-linkedinUne revue de la littérature sur la meilleure approche préventive pour diminuer les blessures infligées lors de la pratique d’un sport révèle que les exercices de renforcement musculaire sont ceux qu’il faut privilégier, puisqu’ils peuvent réduire les risques de blessures d’environ 70 %.

Nombreux seront surpris d’apprendre que, selon cette recension des 25 meilleures études cliniques sur ce sujet, les exercices d’étirement n’ont aucun effet sur la prévention des blessures.

Résultats (réduction du risque relatif de blessures) :

Exercices de renforcement musculaire : – 69 %
Exercices de proprioception : – 45 %
Exercices d’étirement : -0,96 % (non significatif)

Réf. : LAUERSEN J. B. et autres. Br J Sports Med doi:10.1136/bjsports  2013-092538.

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L’articulation

Pour comprendre il faut d’abord réaliser que ce phénomène se produit au sein d’une articulation. Une articulation se compose de deux os qui font contact au niveau de leurs cartilages, sorte de revêtement protecteur qui recouvre l’extrémité des os et permet à ceux-ci de glisser les uns sur les autres (figure 1). Une membrane synoviale entoure chacune de nos articulations et les cellules de cette membrane sécrètent un liquide : le liquide synovial. Ce liquide lubrifie le mécanisme et est essentiel à la nutrition de l’articulation. En effet, comme il n’y a pas de circulation sanguine à l’intérieur de la capsule articulaire, c’est le liquide synovial qui y assure le transport des nutriments. Sans liquide synovial, les chondroblastes qui maintiennent le cartilage en bon état, ne pourraient survivre et l’articulation dégénérerait rapidement.

Il faut aussi savoir que des gaz sont dissous dans ce liquide; on y retrouve de l’oxygène, de l’azote et principalement (80 %) du dioxyde de carbone (CO2).

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Mécanisme du « pop »

Les bruits peuvent être d’origine « intra-articulaire », c’est à dire qu’ils proviennent de l’intérieur d’une articulation. Si on essaie d’étirer une articulation, une jointure du doigt par exemple, l’expansion de celle-ci est limitée par un certain nombre de facteurs. Un de ces facteurs est le volume du liquide synovial. Le liquide synovial ne peut pas prendre de l’expansion et laisser l’articulation se distendre à moins que les gaz qui y sont dissous ne reviennent à l’état gazeux. Si la force de traction sur l’articulation est assez grande (si l’on tire assez fort) la baisse de pression ainsi créée force les gaz à revenir à l’état gazeux (phénomène de « cavitation » i.e. formation de bulles de gaz dans le liquide synovial) augmentant ainsi le volume à l’intérieur de l’articulation d’environ 15 à 20 %.

Le « pop » que l’on entend provient du passage des gaz dissous vers l’état gazeux, et on ne peut faire « craquer » l’articulation jusqu’à ce que les gaz se soient à nouveau dissous dans le liquide synovial. En fait, si à ce moment l’on prend une radiographie, on peut voir les bulles de gaz à l’intérieur de l’articulation ! C’est un peu comme quand on ouvre une bouteille d’eau gazeuse. La boisson étant embouteillée sous haute pression le gaz carbonique dissous dans la boisson revient à l’état gazeux aussitôt que la pression sur le liquide baisse en ouvrant la bouteille, provoquant le «pop» et les fameuses  » bubulles  » !

Une autre source de « bruits » et de sensations de crépitement  provient du frottement des tendons et des ligaments. Les experts les nomment « craquements extra-articulaires » parce que justement leur origine ne provient pas de l’articulation elle-même. En effet, pour qu’un muscle puisse provoquer du mouvement, celui-ci doit obligatoirement traverser une articulation. Or, quand l’articulation bouge, le tendon (la bande de tissus conjonctifs qui relie le muscle à l’os) peut frotter sur d’autres structures, comme un autre tendon, un ligament (bande de tissus conjonctifs qui relie deux os), un muscle, ou une protubérance osseuse.

Quant à savoir si la manœuvre est dangereuse ou si elle peut endommager l’articulation, aucune preuve scientifique ne permet de le dire. Selon Raymond Brodeur , ergonome à l’Université Michigan State, il n’y a pas de relation entre l’habitude de se faire craquer les doigts et l’arthrose. Donc, en l’absence de douleur il faut retenir que ces bruits sont très rarement dangereux et ne sont que les conséquences du fonctionnement normal du système musculosquelettique. Le vieil adage « tant que ça craque, c’est que ça ne casse pas » était finalement bien fondé ! Vous avez appris quelque chose de nouveau ? ; si oui, tant mieux ; partagez l’article maintenant !

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